Le discours de Fabrice Roux, réélu Président de la Scène Indépendante pour 3 ans

"Chers collègues,

En devenant La Scène Indépendante, Le Syndicat National des Entrepreneurs de Spectacle, a souhaité affirmer son attachement à l’Indépendance artistique et économique en tant que moteurs de l’exception culturelle et clé de voûte de la diversité des expressions et des esthétiques. 3 ans après son approbation, cette nouvelle dénomination est pleinement reconnue et porte ses fruits.

De nombreux entrepreneurs et entrepreneuses de spectacles se sont reconnus dans cette appellation et nous ont rejoint. Les pouvoirs publics nous identifient clairement comme l’un des deux syndicats représentatifs du spectacle vivant privé. Pas le premier certes, mais un syndicat différent, doté d’une approche nouvelle des problématiques du spectacle vivant et qui porte parfois, souvent même, d’autres formes de revendications. Nous sommes aujourd’hui une force de proposition capable de faire cohabiter harmonieusement la logique artistique et la logique commerciale dans nos entreprises.

La plupart d’entre-nous se revendiquent artisans. Nous ne sommes pas des industriels. Nous sommes des artisans au sens noble du terme. Sans doute parce que nous sommes nombreux à avoir été ou l’être encore artiste avant d’être producteur ou diffuseur. Nous sommes résolument et pleinement à l’écoute des artistes et si nous sommes conscients des contraintes financières de nos activités, nous privilégions toujours la valeur artistique à la valeur marchande.

Les institutions semblent bien en avoir conscience aujourd’hui et c’est pour cette raison que nous avons obtenu une réforme en profondeur de l’ASTP. Ce fût un long et difficile combat, qui n’est pas tout à fait terminé, mais j’ai bon espoir qu’il débouche sur une réelle victoire pour notre syndicat et les entrepreneurs indépendants qu’il représente, mais plus généralement pour l’ensemble de la filière.

Et c’est pour ces mêmes raisons que nous réclamons des évolutions du règlement des aides du CNM, une simplification du RGA, une commission exclusivement dédiée à l’humour, un retour au droit de tirage à 65%, ou une gouvernance dans laquelle nous serions représentée. C’est aussi pour cette raison que nous nous battons contre la concentration des entreprises de production ou de gestion des salles de spectacles entre les mains de quelques groupes. C’est à ce prix que nous défendrons et conserverons l’exception culturelle française créée en son temps pour résister à l’Organisation Mondiale du Commerce aujourd’hui attaquée par des droits de douane qui bouleversent l’ordre mondial et pourraient amener certains à la remettre en cause.

REMERCIEMENTS

Je tiens évidemment à remercier les adhérents qui m’ont réélu au sein du Comité de Direction ainsi que les membres du Comité de Direction qui m’ont renouvelé leur confiance pour assurer la présidence de notre syndicat.

À travers eux, je veux saluer l’extraordinaire dynamisme de toutes celles et ceux, artistes, techniciens, personnels administratifs, partout en France et dans les Outre-Mer, qui créent, produisent et diffusent des spectacles vivant pour tous les publics. Notre pays n’a pas toujours conscience de cette vitalité, de cette force incroyable du spectacle vivant qui, à l’heure de la domination des écrans, résiste et persiste à créer du lien entre les gens, à susciter des émotions.

Je souhaite également remercier nos interlocuteurs aux ministères, les parlementaires, élus locaux, personnels administratifs pour leur écoute et leur intérêt. Merci aux organisations professionnelles et syndicales, aux organismes de gestion collective, à l’ensemble de nos partenaires qui nous permettent de développer nos actions. Et permettez-moi de les remercier pour leur patience à mon égard. On ne naît pas président. Ils ont su me donner le temps nécessaire pour habiter la fonction.

J’adresse un salut amical et complice à nos amis du Syndicat National de l’Edition Phonographique avec lesquels nous avons noué un partenariat croisé qui permet à nos adhérents respectifs de bénéficier du savoir-faire de nos adhérents pour développer leurs activités connexes à 360°.

Merci enfin à l’équipe de la Scène Indépendante pour son action quotidienne au service de la défense de nos intérêts.

Je voudrais vous dire ma fierté d’être aujourd’hui confirmé en tant que Président. Mon arrivée à la Présidence il y a 3 ans a pu faire naître quelques inquiétudes auprès de certains. J’avais immédiatement annoncé vouloir travailler pour l’ensemble des adhérents de notre syndicat, sans distinction d’importance ou d’influence, avec conviction, sens de l’équité et probité, qui sont des valeurs reconnues de notre syndicat.

Les combats qui s’annonçaient pouvaient sembler perdus d’avance. Je prends votre confiance renouvelée comme une reconnaissance du travail entrepris et une invitation à continuer patiemment dans l’unité avec courage et audace.

Je voudrais profiter de l’occasion qui m’est donnée pour saluer l’esprit qui règne à La Scène Indépendante. Nous sommes certes des concurrents, mais nous n’en demeurons pas moins et avant tout des collègues et parfois même des amis. En ces temps de grandes violences dans les débats politiques, nous ne pouvons qu’être fiers de l’esprit de bienveillance et de partage qui habite notre syndicat à tous les étages. Que ce soit entre les salariés, au sein du comité de direction ou encore entre nos adhérents. Nos Assemblées Générales en sont la parfaite illustration.

J’ai poursuivi, avec le tempérament que vous me connaissez, l’action que Jean-Claude Lande, dans un esprit de confraternité et de gentillesse, avait entamée pour que notre syndicat prenne une place incontestable dans le paysage du spectacle vivant. Nous sommes aujourd’hui 415 et pouvons raisonnablement viser les 500 membres dans les années qui viennent.

Nous sommes indépendants mais nous ne sommes pas isolés. Nous sommes nombreux et divers, de plus en plus nombreux et divers. Nous n’avons jamais été aussi nombreux depuis 1920, date de la création de notre syndicat, et ce, malgré le fait que nous ayons essaimé, puisque je vous le rappelle, le Syndéac et le Prodiss devenu Ekhoscènes, en sont deux émanations. Pour l’avenir, ma volonté de rassembler ce qui est diffus et de travailler à la concorde avec les autres syndicats et institutions du secteur est décuplée.

Si le premier combat que nous avons gagné a été celui de l’ouverture des Molières à toute la filière, sans distinction d’appartenance à une quelconque organisation, la réforme de l’ASTP aura été le grand chantier de mon mandat qui s’achève. J’ai assisté à plus de 40 réunions, étudié des milliers de pages de PV, règlements, rapports, statuts, organisé des centaines de rendez-vous, pour que Rima Abdul Malak demande un rapport, Rachida Dati le publie et demande une réforme en profondeur qui prenne les recommandations de l’IGAC à la lettre. La réforme de la gouvernance a redistribué les cartes. Et je n’ai aucun doute sur le fait que la nécessaire révolution de l’ASTP est en marche. Elle devrait accoucher en décembre 2025. Alors que j’étais bien le seul avec Philippe Chapelon, notre délégué général, en novembre 2022 à penser que je réussirai à faire bouger les choses, permettez-moi d’être fier du chemin parcouru. Ce combat m’aura permis de mesurer mon endurance, ma patience, et ma détermination.

La réforme que nous avons appelée de nos vœux aux victoires de la musique pour transformer les collèges de votants et éviter la concentration des nommés et lauréats a été entamé par le président Vincent Frérebaud et avec l’ensemble des membres du CA des Victoires de La Musique, nous travaillerons à continuer ce travail et à faire naître enfin les victoires professionnelles de la musique.

Dans l’intérêt de nos 103 adhérents humour, nous avons travaillé à structurer la filière en participant activement à la création de La Communauté de l’Humour, association qui regroupe aujourd’hui les EGH, la cérémonie des AUGUSTE et demain un futur marché de l’humour.

Je me suis personnellement très investi et nous avons obtenu que chaque producteur puisse aujourd’hui avoir accès aux aides du CNC pour toute captation de spectacle vivant sans passer par un intermédiaire audiovisuel.

LES PERSPECTIVES

J’aborde ce nouveau mandat avec la volonté intacte et peut-être même décuplée, de modifier les rapports de force, de bousculer les petites habitudes, et d’obtenir une distribution plus juste et plus équilibrée des moyens de l’Etat et notamment de ses deux organismes de filière que sont le CNM et l’ASTP.

Je souhaite Fédérer

Pour y parvenir, la première condition est que nous soyons plus nombreux et encore plus unis. Pour convaincre de nouveaux adhérents de nous rejoindre, nous devons certes remporter des victoires, mais nous devons surtout être utiles à nos membres. Nos adhérents sont notre raison d’être, notre origine et notre but. Ils doivent être au cœur de notre action et de notre attention. Nous devons maintenir cette relation de proximité avec chacun d’eux qui fait la marque de notre syndicat. Nous devons continuer en répondant à leurs questions de manière personnalisée et rapidement.

Recruter et unir nécessitent également d’être au plus près de nos adhérents, de connaître précisément leur réalité et leurs besoins. Je souhaite que nous mettions progressivement en place de véritables représentations régionales de notre syndicat. Et j’appelle celles et ceux qui souhaiteraient s’impliquer à ce titre à se faire connaître auprès de notre délégué général et de l’équipe permanente. Les premières délégations doivent pouvoir se mettre en place dès la rentrée.

Des moyens spécifiques dédiés aux Indépendants

Je continuerai évidemment à me battre pour préserver les aides dont vos entreprises peuvent bénéficier à condition qu’elles remplissent les conditions requises : CNM, ASTP, FONPEPS, Crédit d’impôt, Pass Culture, TVA à taux réduit etc.

Mais je veux aussi que nous puissions imaginer ensemble des dispositifs spécifiques d’aide aux Indépendants. Live Nation ne peut pas continuer à bénéficier de 20M€ de Pass Culture ou de 5M€ de droit de tirage du CNM alors qu’elle ne paie qu’un tout petit impôt en France. Les théâtres appartenant au groupe FIMALAC Entertainement ne doivent pas continuer à concentrer plus d’un quart des aides de l’ASTP comme l’a montré le rapport de l’IGAC.

Je n’ai personnellement rien contre les groupes, et l’accord que nous avons passé avec le SNEP le prouve. Il faut même regarder avec bienveillance l’arrivée de ces groupes dans notre écosystème, mais il faut que les pouvoirs publics créent les conditions d’un vivre-ensemble équilibré par la mise en place d’aide dédiée aux indépendants et que ces groupes contribuent au rayonnement du secteur sans en devenir des prédateurs fossoyeurs de nos entreprises.

Je souhaite Apaiser

Je souhaite enfin que ce nouveau mandat soit celui de l’apaisement. Nous ne pouvons pas être attaqués en permanence. Nous devons redoubler d’efforts afin d’inciter nos adversaires à nous écouter, nous interroger, pour mieux nous comprendre, nous respecter. Mener nos combats, avec la force nécessaire, ne doit pas nous empêcher d’entretenir des relations apaisées avec tous nos interlocuteurs, même nos concurrents. S’ils sont parfois nos adversaires, ils ne doivent jamais devenir des ennemis.

Notre force, c’est notre liberté. Elle nous permet de parler à tous, elle nous autorise à écouter toutes les voix. Notre liberté fait que nous pouvons nouer des accords en fonction des circonstances, selon les dossiers et les sujets, dans l’intérêt supérieur de nos adhérents.

Je souhaite me Présidentialiser

J’en terminerai avec un dernier souhait : que ce mandat soit celui d’une plus grande implication de chacune et chacun de nos membres dans la vie du syndicat, à quelques niveaux que ce soit.

Nous sommes une alliance de professionnels qui partageons les mêmes valeurs : liberté d’entreprendre, audace dans la prise de risque, sincérité de l’engagement et de la relation aux artistes. Il appartient à chacun de nous de les faire vivre et de les partager avec ses pairs, c’est ainsi que nous les convaincrons de nous rejoindre.

Nos futurs délégués régionaux permettront d’assurer une représentation territoriale et de structurer nos actions à cette échelle. Car même si beaucoup de choses – beaucoup trop d’ailleurs - se discutent et se décident encore à Paris, nous devons être de plus en plus présents auprès des Collectivités territoriales et des services déconcentrés de l’Etat.

Au cours de ce mandat, je souhaite déléguer davantage de responsabilités aux membres du Comité de Direction. Je veux qu’ils prennent en charge certains dossiers afin de démultiplier nos forces et notre capacité de conviction. Je souhaite de cette manière prendre un peu de recul pour arbitrer les dossiers en laissant le soin à chacun de s’investir au maximum dans la limite de ses disponibilités.

Notre Comité doit devenir plus paritaire. Pour cela, nous avons engagé une action de mentorat afin d’accompagner les femmes qui souhaitent s’engager dans la prise de parole et de responsabilité. Nous devons offrir de nouveaux visages, rajeunir et diversifier notre image, à l’instar de ce que nous sommes.

L’édition 2024 d’Avignon s’est déroulée dans un contexte particulier. Les Jeux Olympiques d’un côté, et les élections législatives de l’autre, ont provoqué des perturbations importantes pour notre profession. Dans ce contexte, la Scène Indépendante demande une aide au rebond pour Avignon Off 2025 et 2026 permettant de compenser une partie des pertes de 2024.

Pour l’édition 2025 du Festival d’Avignon, un cycle musical inédit va voir le jour : "La musique se lâche pendant les relâches", qui investira durant les relâches 7 théâtres avec 27 concerts et 52 artistes.

Je souhaitais également faire part du décès de Jean-Paul Bazin, ardent défenseur des artiste et soutien fidèle de la culture indépendante. Une nouvelle d’une grande tristesse. Il va nous manquer.

Nous saluons également l’arrivée d’une nouvelle délégation générale, avec Denis Declerk qui remplacera définitivement Philippe Chapelon à la rentrée prochaine.
Leur expérience et leur engagement sont des atouts précieux pour affronter les défis qui nous attendent.

Merci à l’équipe de La Scène Indépendante : Chrystelle Jongenelen, Responsable des relations extérieures & Référente Théâtre, Marie Beffeyte, Chargée Musique et Humour & Référente Transition écologique, Mathilde Chauveau, Assistante de direction, Chargée du développement adhérent(e)s & Référente Parité, Leila Bellot, Chargée de mission 360, Judith Gloux, Juriste, Elisa Despiney, Chargée de communication & Lucile Roor notre stagiaire à la communication.

Ce qui nous réunit au sein de La Scène Indépendante est avant tout cet esprit d'indépendance que nous revendiquons afin de mener et de développer en toute liberté et sur l'ensemble du territoire nos activités artistiques. 

Nous ne le répéterons jamais assez, le spectacle vivant n'est pas une industrie c'est bien davantage une démarche « d'artisanat artistique ».

N'oublions jamais que les indépendants sont la clef de voûte de la diversité si chère à notre activité et la pierre angulaire de l’exception culturelle française.

Je vous remercie pour votre écoute."